L'influence de l'état antérieur de la victime sur le montant de son droit à indemnisation.-La notion d'état antérieur est protéiforme.--Il peut s'agir de prédispositions pathologiques,..." />

Etat antérieur et droit à l 'indemnisation

L'influence de l'état antérieur de la victime sur le montant de son droit à indemnisation.

La notion d'état antérieur est protéiforme.


Il peut s'agir de prédispositions pathologiques, d'antécédents, de l'état anormal, de l'état pathologique, de l'état de vulnérabilité, de la fragilité constitutionnelle etc…


La question centrale est de savoir était l'état de la victime avant l'accident de la circulation ou bien une erreur médicale.


En cas d'accident de la circulation, il conviendra de vérifier si la victime qui présentait par exemple une hernie discale dont les douleurs se sont révélées dans toute leur ampleur postérieurement au choc subi.


Pour une intervention chirurgicale, la question se posera de la paralysie du patient qui présentait déjà hernies discales à répétition.


Quelles sont les conséquences de cet état antérieur sur le droit à indemnisation du patient ou de la victime ?


Le rôle de l'avocat est donc, et dès le stade de l'expertise, d'obtenir une juste qualification de cet état antérieur dans l'intérêt de son client.


I. L'état antérieur indifférent à l'indemnisation


La Cour de cassation affirme que " le droit de la victime à obtenir l'indemnisation de son préjudice corporel ne saurait être réduit en raison d'une prédisposition pathologique lorsque l'affection qui en est issue n'a été provoquée ou révélée que par le fait dommageable "


Si les prédispositions sont inconnues de la victime et que l'accident apparaît comme le facteur déclenchant de la pathologie, qu'il laisse apparaître en faisant surgir une fragilité constitutionnelle, physique comme psychique, la victime sera intégralement indemnisée.


Si les prédispositions sont connues de la victime mais n'ont pas encore provoquées d'effets pathologiques, la question de l'indemnisation est plus discutée. Cette problématique se rencontre surtout en matière médicale.

Illustration :


L'indemnisation intégrale de la perte de gain professionnelle est due lors d'une décompensation d'un état antérieur arthrosique :


« le droit à obtenir l'indemnisation de son préjudice corporel ne saurait être réduit en raison d'une prédisposition pathologique lorsque l'affection qui en est issue n'a été provoquée ou révélée que par le fait dommageable »



En l'espèce, la victime présentant un état antérieur de cervicarthrose et de lombarthrose. Les séquelles liées à l'accident sont en lien avec une décompensation de l'état antérieur.


L'expert judiciaire en avait déduit une imputabilité partielle ce qui impliquait une indemnisation partielle du préjudice.


Sans surprise, la Cour de Cassation a censuré l'analyse des juges du fond qui avaient entériné l'analyse de l'expert judiciaire et juge que la prise en compte de la pathologie préexistante à l'accident ne peut entrainer le rejet de la demande d'indemnisation de la perte de gains professionnels futurs, uniquement si les effets néfastes de la pathologie s'étaient déjà révélés avant la date de l'accident.


Cass. 2e Civ., 29 septembre 2016, n°15-24541

Il. L'état antérieur réduisant l'indemnisation


Si les effets néfastes de la pathologie se sont révélés antérieurement à l'accident, l'état antérieur est de nature à réduire l'indemnisation de la victime.


Par exemple, la victime d'un accident de la route, ne saurait être indemnisée de l'incidence d'une incapacité permanente partielle auparavant provoquée par d'autres accidents même si ceux-ci n'ont pas donné lieu à une indemnisation effective.


III. L'introduction de la notion d " état anormal de la victime " pour les accidents médicaux


Le législateur a étendu le champ de la notion d' " état antérieur " à propos de la prise en charge des accidents médicaux, l'intervention de la solidarité nationale étant subordonnée à ce que les actes de soins les plus dommageables aient eu pour le patient " des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l'évolution prévisible de celui-ci " (C. sant. pub., art. L. 1142-1 II).


La loi du 4 mars 2002 a, dans le domaine spécial des accidents médicaux, soumis la prise en charge publique des cas les plus lourds à la preuve de " conséquences anormales " des actes de soins, au regard de l' "état de santé " du patient comme de son " évolution prévisible ".


Cet état antérieur est devenu l'une des principales causes de refus d'indemnisation par l'ONIAM.


La notion d'état antérieur est donc complexe et peut avoir des conséquences importantes sur le droit à indemnisation de la victime.


Cette dernière doit impérativement se faire conseiller dès le stade de l'expertise, dans la mesure où, concrètement, la notion d'état antérieur sera principalement appréciée par l'expert médical.