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Suicide

Un assureur doit-il indemniser les victimes passagères d'un accident de la circulation en cas de suicide du conducteur? Intervention du FGAO ou de la CIVI?

Un individu prête son véhicule régulièrement assuré à un tiers, Madame X, qui selon les témoignages ne possède pas de permis de conduire.

Madame X, conducteur du véhicule décide de doubler la file des véhicules arrêtés au passage à niveau alors que les barrières du passage à niveau sont baissées avec les feux clignotants.

Madame X franchi la ligne blanche, les barrières et s'immobilise entre les deux voies ferrées.

Elle a ensuite fait marche arrière afin de se positionner sur la voie sur laquelle le train arrivait ayant constaté qu'elle ne s'était pas arrêtée sur la bonne voie.

Le train a ensuite percuté le véhicule.

Les trois occupants du véhicule sont décédés, dont ses deux enfants mineurs.

La question est donc de savoir si dans l'hypothèse où le conducteur utilise un véhicule pour se suicider et tuer ses passagers, les ayants droit des passagers peuvent obtenir la réparation de leur préjudice moral auprès de la compagnie d'assurance du véhicule impliqué dans le sinistre.

Il est de jurisprudence constante que les dommages résultant d'une action volontaire sont exclus du champ d'application de la loi du 5 juillet 1985.

En principe, la faute volontaire exclut la qualification d'accident de la circulation puisque le véhicule n'est utilisé que comme un moyen de nuire à autrui.

En l'espèce, Madame X s'est suicidée et a tué ses enfants en utilisant son véhicule comme moyen pour parvenir à ses fins.

Cet évènement ne peut donc en aucun cas être qualifié d'accidentel ce qui impliquerait un fait dommageable indépendant de sa volonté.

L'application de la loi de 1985 se trouve donc écartée puisque l'une de ses conditions de mise en œuvre est la survenance d'un fait accidentel.

D'après le rapport d'enquête, son intention de se donner la mort et de tuer ses enfants ne fait aucun doute.

Dès lors, la jurisprudence selon laquelle la loi de 1985 n'est pas applicable en cas d'infraction volontaire trouve pleinement à s'appliquer :

- Civ. 2ème, 30 nov.1994 :
"La loi du 5 juillet 19985 n'est applicable qu'aux seuls accidents de la circulation à l'exclusion des infractions volontaires ".

- Civ. 2ème, 22 janvier 2004 :

" Attendu que, pour rejeter la demande de M. X..., l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble du 14 mars 1995 retient que pour fuir les policiers qui le poursuivaient, le conducteur d'un véhicule poursuivi a sans hésitation donné un coup de volant, percuté le véhicule administratif qui le pourchassait et projeté celui-ci sur le véhicule administratif qui venait en renfort et qui était conduit par M. X..., que le conducteur du véhicule poursuivi n'a pu agir volontairement à l'encontre de M. X..., dont le véhicule n'a été heurté que par ricochet, que la seule action volontaire de ce conducteur était manifestement d'échapper aux policiers et que, ce faisant, il a occasionné un accident de la circulation ;
Attendu qu'en statuant ainsi alors qu'il résultait de ses propres constatations que le dommage subi par M. X... était la conséquence directe de l'action volontaire du conducteur et ne résultait pas d'un accident de la circulation, la cour d'appel a violé l'article 1er de la loi du 5 juillet 1985. "


Le fait pour Madame X d'avoir volontairement tué ses deux enfants en utilisant un véhicule n'est pas constitutif d'un accident de la circulation au sens de la loi de 1985, ce qui implique que les pères des fillettes ne disposent d'aucun droit à indemnisation de leur préjudice moral contre l'assureur du véhicule utilisé pour le meurtre.

Le fait que cet accident ne puisse pas recevoir la qualification d'accident de la circulation, exclut donc également l'intervention du fonds de garantie automobile.

Par ailleurs, les pères des fillettes peuvent saisir la commission des victimes d'infractions afin de tenter d'obtenir l'indemnisation de leur préjudice moral consécutif à la perte de leur enfant auprès du fonds de garantie des victimes d'infractions et d'actes de terrorisme.